Innovation collaborative : comment passer de la boîte à idée en carton à l’innovation à l’échelle ?

Vous avez envie de mobiliser votre collectif pour innover, parce qu’innover c’est important (en tout cas c’est ce qui se dit). Vous voulez libérer l’intelligence collective de votre organisation, persuadé qu’en chaque salarié se cache un Steve Jobs en puissance qui n’attend qu’à se révéler.

Bravo, cet enthousiasme vous honore, même si la réalité est plus nuancée. Nous avons accompagné de nombreuses démarches d’innovation participative / collaborative et il faut se rendre à l’évidence : les choses ne sont pas si simples. L’intention ne suffit pas toujours et une démarche mal menée peut même être contre productive. Il existe différents niveaux de maturité de ces démarches qui vont de la plus naïve à la plus aboutie.

Voici donc un résumé des différents niveaux de maturité de démarche que nous avons pu observer.

Niveau 1 : la boîte à idées en carton

L’organisation lance une vague boîte à idées en carton sur un sujet un peu flou. Il y a trop peu de participants au challenge, ou bien à l’inverse trop de participants. L’organisateur est vite débordé par les idées produites et ne sait pas trop quoi en faire : qui porte les idées, que fait-on de ces pistes d’action ? Vous remarquerez que je parle de « l’organisation » et pas du CODIR ou du DG parce qu’en fait personne ne sait vraiment qui porte cette démarche.

Il n’y a pas de retour vers les participants au challenge à part une smartbox remportée par le porteur de l’idée gagnante qui ne sera de toute façon jamais concrétisée.

Soyons clairs, il s’agit ici d’innovation participative. On demande à chacun d’apporter une idée, mais il n’y a pas de travail en groupe, de coconstruction, on ne peut donc pas parler d’innovation collaborative.

Cette approche est clairement dangereuse. Les collaborateurs mobilisés se sentiront manipulés, l’image de la direction sera écornée et il sera très difficile par la suite de relancer une démarche contributive

Niveau 2 : la boîte à idées 2.0

Le sujet du challenge est clair même s’il manque d’ambition. Des actions de communication sont définies pour mobiliser largement les collaborateurs autour de la démarche. On a troqué la boîte à idées en carton contre un outil digital du marché qui permet à chacun de proposer des idées et voter. Mécaniquement, l’entreprise obtient de nombreuses idées. Bien sûr, parce qu’on est persuadé de la puissance de l’intelligence collective, on veut mettre en œuvre toutes les idées qui sont toutes également géniales. Accessoirement on ne veut vexer personne non plus.

Des groupes projets sont alors courageusement lancés par ceux qui ont soumis les idées. Rapidement ils se retrouvent un peu seuls : ils ont du mal à mobiliser les bons interlocuteurs dans l’entreprise et ils ne bénéficient que de très peu de soutiens. Il n’y a pas eu de coconstruction, ou très peu, ce qui mécaniquement implique que l’idée reste l’idée du porteur et pas d’un collectif.

Bref, la démarche s’essouffle rapidement, et au bout d’un an et demi, quelques idées voient péniblement le jour sur un périmètre généralement beaucoup moins ambitieux que l’idée de départ.

On revient alors vers les participants au challenge qui avaient oublié jusqu’à l’existence même du challenge et avaient d’ores et déjà classé la démarche dans la catégorie : « on s’est bien moqué de nous avec cette mode des boîtes à idées 2.0 ».

Niveau 3 : le mode commando

Cette fois le chalenge est clair et on a limité le nombre d’idées que l’on souhaite voir émerger. Chaque thématique est portée par un sponsor bien identifié et c’est un membre du CODIR.

La communication est percutante et permet de mobiliser les porteurs d’idées. Mais elle ne s’arrête pas au lancement. Tout au long du challenge, on communique de façon transparente sur l’avancée. Il existe même un « label » qui permet d’identifier de façon explicite les actions mises en œuvre provenant d’une idée du challenge.

Pour faire émerger un maximum d’idées, on choisit de mixer du participatif (boite à idées en ligne) et du collaboratif (ateliers de créativité). C’est l’occasion de créer (ou de mobiliser si elle existe déja) une communauté de facilitateur/innovacteur/change maker qui sera en charge d’animer ces ateliers. Car au dela du challenge en lui même, c’est l’occasion pour l’organisation de diffuser des pratiques de créativité, d’nnovation et de collaboration nouvelles qui survivront à cette démarche d’innovation ponctuelle.

Au bout du compte on aboutit à un nombre restreint d’idées qui débouchent sur des projets. Un chef de projet et une équipe sont identifiés pour chaque projet. Le problème c’est qu’ils travaillent en mode « perruque », c’est-à-dire que c’est un projet en plus de leur travail quotidien. Ils n’ont pas de temps clairement dédié pour faire avancer le projet. Les équipes projets sont rapidement happées par leur quotidien et ont du mal à les faire avancer. C’est poussif et ça demande énormément d’efforts aux équipes projets qui sont réellement en mode commando, mais au final une partie des projets aboutit.

Les équipes ressortent quand même rincées, par sûr qu’elles recommencent l’expérience.

Niveau 4 : l’innovation à l’échelle

Le sujet du challenge d’innovation collaboratif est réellement stratégique. On attend de ce challenge des idées qui vont réellement porter la stratégie de l’organisation et pas juste des idées « sympas ». Lancer un challenge sur des sujets à forts enjeux, c’est le meilleur moyen de se donner réellement les moyens. On limite d’entrée de jeu le nombre d’idées qui sortiront du challenge. Les sponsors sont identifiés dès le début et participeront activement tout au long du challenge.

Loin d’être un coup de communication, on engage les collaborateurs dans une démarche

  • pérenne : ce qui sera mis en œuvre lors de cette démarche a vocation à être réutilisé dans l’organisation par la suite (démarche d’innovation, ateliers collaboratifs…).
  • apprenante : les participants montent en compétence à l’occasion de ce challenge, on n’hésite pas à les former. Ce challenge est l’occasion de créer une culture commune de la collaboration et de l’innovation dans l’organisation.
  • structurée : dès le départ, on souhaite aller plus loin que la simple idée. On s’assure donc, à travers des démarches issues du design thinking, que l’idée est réaliste et répond à de véritables difficultés. On fait le choix de ne sélectionner que des idées que l’on sait pouvoir mettre en œuvre dans un temps raisonnable.

Et puis surtout, on anticipe la structure projet qui va porter les idées produites. Il peut s’agir :

  • D’une équipe à part, qui n’a pas forcément participé à la production de l’idée. Par exemple l’équipe du lab d’innovation qui prend en charge l’idée après la phase de créativité et de cadrage.
  • D’une équipe terrain à qui on alloue du temps. Elle peut fonctionner en mode design sprint, comme ce que nous proposons régulièrement, et être mobilisé donc 6 jours pendant 6 mois pour mettre en œuvre l’idée produite. Attention, cette équipe ne peut pas être constituée uniquement de volontaires. Il faut également aller chercher les compétences nécessaires pour le bon déroulement du projet.

Quoi qu’il en soit, le sponsor est présent tout au long de la mise en oeuvre pour lever les potentieles difficultés rencontrées par l’équipe.

Voici donc les 4 niveaux de maturité d’une démarche d’innovation collaborative que nous avons pu observer.

Vous l’aurez compris, plus on monte en maturité et plus on a de chances de voir aboutir sa démarche.

Nous en sommes persuadés, lancer une démarche d’innovation collaborative, c’est un des meilleurs moyens d’innover et de mobiliser son collectif, alors lancez-vous, mais faites le bien !

Et puis si vous avez un doute, nous sommes là pour vous accompagner.

À propos de sacha lopez

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