Pour cet article, nous avons le plaisir de laisser la plume, à l’ami François Amisse, expert/formateur Lean startup. Il nous partage son expérience sur cette démarche conceptualisée par Eric Ries.
Le Lean Startup fait le buzz depuis bien longtemps mais, à moins de vous être bien documenté, savez-vous vraiment à quoi ça sert et comment en tirer parti dans votre entreprise ?
Je vous explique en 4 paragraphes ce à quoi ça correspond et comment l’appliquer concrètement chez vous, dans votre entreprise.
1 – Le Lean Startup, ça n’est pas que pour les startups !
Né d’un problème (ça tombe bien, c’est fait pour les résoudre), l’approche Lean Startup a vu le jour dans la Silicon Valley (ça claque !) et a été créée par Eric Ries suite à un cuisant échec dû à ce qu’on appelle « l’effet tunnel » dans l’informatique. Il a cherché à comprendre pourquoi, au bout de 6 mois de travail acharné sur un produit logiciel, ses clients ne voulaient pas de sa merveilleuse application. En fait, il a compris que ce qu’il avait créé n’était utile à personne. C’est ballot…
La question qu’il s’est posée était alors de comprendre comment créer quelque chose qui trouverait des clients et donc un marché.
Pour ça, il s’est intéressé au mouvement Lean qui consiste à optimiser les processus et qui trouve ses origines au Japon. Le principe du Lean est de chercher constamment à augmenter la performance d’un système tout en réduisant les coûts (appelé « gaspillage »).
Bon ça, c’était pour vous expliquer le mot « Lean ». Intéressons-nous maintenant au mot « Startup ».
Une définition nous est donnée par Steve Blank, mentor d’Eric Ries et créateur du « Customer Development », une méthode consistant à vérifier qu’un marché existe pour un produit donné : « Une startup est une organisation créée pour chercher un modèle économique répétable et évolutif ». Un modèle économique (vous entendrez souvent parler de « Business Model ») consiste à décrire comment une entreprise crée, délivre et capture de la valeur.
Si l’approche Lean Startup a été créée dans le cadre des startups, ce n’est pas pour autant qu’elle n’est pas applicable aux autres formes d’organisation. C’est ce que je vais vous démontrer.
2 – À la découverte de son marché
Pour vivre, une entreprise doit non seulement avoir quelque chose à vendre mais elle doit surtout avoir des clients. Sinon, à moins de faire un casse de temps en temps pour payer vos factures, vous n’irez pas bien loin 😉
C’est bien ça le « nerf de la guerre », trouver des clients et encore faut-il que vous soyez sûr que les personnes que vous touchez sont bien des clients, c’est-à-dire des personnes qui sont prêtes à payer pour votre produit ou service.
Je vous le disais un peu plus haut, Steve Blank est l’auteur d’une méthode qui s’appelle le « Customer development ». En appliquant quelques principes basés sur le bon sens, cette démarche vous permet de chercher à vérifier que des clients existent, qu’ils sont intéressés par votre offre, prêts à payer pour acquérir vos produits ou services, et enfin qu’ils vous seront fidèles dans la durée de façon à pérenniser votre entreprise. Si vous comptez bien, vous voyez qu’il y a donc 4 phases importantes : découvrir qui sont vos clients (« customer discovery »), la validation des clients (« customer validation »), la création de votre portefeuille de clients (« customer creation ») et enfin, la création de votre entreprise/activité/projet (« company building »).
Une autre notion importante est celle du « pivot » qui consiste à changer de « braquet », à persévérer dans votre trajectoire sur la base de retours positifs de vos clients ou d’arrêter. Oui, il est préférable parfois d’abandonner si vous avez les preuves suffisantes qui vous invite à ne pas investir plus de temps, d’argent et d’énergie dans un projet qui ne tient pas la route. Le pivot intervient entre la 1ère et la 2ème étape du Customer Development, entre la recherche et la validation des clients. Par exemple, si votre produit s’adresse à des familles mais qu’au final, vous découvrez que ce sont les colocataires qui s’y intéressent, vous pouvez changer votre cible et adapter votre offre à ces derniers. Vous effectuez alors un pivot.
Pour comprendre les attentes de votre cible (les clients), vous devez émettre un ensemble d’hypothèses que vous validerez (ou pas), de façon à pivoter, prendre la décision de continuer, d’arrêter (hé oui, je le répète, parfois, mieux vaut s’arrêter s’il n’y a personne d’intéressé) ou d’apporter des modifications.
Allez, encore une nouvelle notion : le MVP (Minimum Viable Product). Il s’agit d’un « produit minimum viable », quelque chose qui vous permet de démontrer la valeur fondamentale de votre proposition de valeur. La proposition de valeur, c’est la promesse que vous faites à vos clients, l’intérêt qu’ils auront à acheter votre solution. Le MVP doit vous permettre d’aller à la rencontrer de vos clients supposés, pour tester vos hypothèses.
Mais c’est quoi cette bête bizarre en fait, le MVP ? Alors de grands débats ont lieux sur sa définition, je vous propose donc la mienne.
Pour faire simple, un MVP est le moyen de valider rapidement et à moindre coût votre proposition de valeur, d’un point de vue viabilité commerciale. Le MVP n’est pas un prototype. La différence réside dans le fait qu’un prototype se voudra le plus exhaustif possible sur les fonctionnalités, il doit valider la faisabilité technique (comme le processus de fabrication ou les matériaux utilisés). Dans un MVP, peut importe ces aspects techniques, ce qu’on cherche à faire, c’est à valider des hypothèses et nous conforter dans notre vision. Si nécessaire, plus tard, une fois le marché trouvé, on pourra passer au prototype, puis à l’industrialisation.
D’ailleurs, que ce soit pour fabriquer votre MVP ou votre prototype, il existe aujourd’hui de bons moyens de le faire à faible coût, c’est de vous rendre dans un « Fablab ». C’est un lieu de type atelier de fabrication où vous trouverez tout ce qu’il vous faut pour façonner votre produit et où vous pourrez avoir accès à des conseils de spécialistes pour vous accompagner dans sa réalisation.
3 – C’est bien tout ça mais qu’est-ce que ça m’apporte à moi, manager ? Et à mon entreprise ?
Vous allez vite comprendre l’intérêt de cette démarche, que vous soyez manager, créateur d’entreprise, responsable produit ou projet.
En général, tout projet commence avec une vision ou une idée qui vous tient à cœur. Vous pensez qu’un problème existe ou qu’un besoin n’est pas comblé pour un certain nombre de personnes (votre cible).
Vous réunissez alors votre équipe pour exposer votre trouvaille ou mieux, vous la laissez chercher ce qu’elle pourrait améliorer ou créer de neuf. Pour cela, vous pouvez faire intervenir un ensemble d’outils tels que le Design Thinking (une méthode de résolution de problème basée sur l’empathie des utilisateurs et l’observation de leurs usages), les techniques d’idéation qui se jouent en groupe pour générer des idées (l’avantage est que vous renforcez au passage la cohésion d’équipe et vous favorisez l’intelligence collective car, c’est bien connu, on est logiquement moins con à plusieurs que tout seul… Sans commentaire, je vous l’accorde ça n’est pas toujours vérifié…) ou encore vous vous faites accompagner par un expert de ces techniques/méthodes. Vous pouvez en trouver rapidement autour de vous 😉
Une fois que vous tenez votre objectif, vous pouvez utiliser encore une fois la force de votre équipe pour (1) identifier la cible et (2) émettre un ensemble d’hypothèses à valider auprès de votre cible.
Je vous encourage à faire travailler vos collaborateurs dans des ateliers facilités (conçus et animés par des facilitateurs) qui permettront de faire ressortir de merveilleuses choses auxquelles vous n’auriez pas forcément pensé.
Vient ensuite la phase de confrontation de votre idée et des hypothèses associées à votre cible (le marché). Concevez des scripts d’interviews « problème » pour obtenir des retours en vue de vous adapter et éventuellement « pivoter » (vous vous souvenez, le pivot c’est la décision à prendre pour changer d’orientation).
Ces interviews peuvent se réaliser en binôme. Je vous le conseille d’ailleurs parce que cela permet à l’intervieweur d’être dans une posture de communication totale avec l’interviewé alors que le second interviewer note les remarques qui seront ensuite analysées.
Pour que la démarche soit efficace, pensez à des critères de succès, comme le pourcentage de personnes intéressées ou le niveau de prix de votre offre qui obtient l’adhésion. Ces indicateurs vous permettront de mesurer votre progression et de prendre la décision de pivoter si nécessaire, ce qui risque fort d’arriver 😉
Une fois vos interviews « problème » réalisées, vos retours clients en poche, produisez un MVP (qui rendra tangible votre idée) et recommencez vos interviews mais cette fois-ci, sur la solution que vous avez imaginée. Armé de votre MVP, vous retournez vers vos clients potentiels, vous leur montrez votre produit minimum viable et vous recueillez de nouveau leurs avis.
Votre MVP peut prendre la forme d’une vidéo, d’un produit très basique (certains utilisent un bout de bois ou du carton), une maquette, etc. Bref, n’importe quoi du moment que ça puisse démontrer l’intérêt premier de votre offre, le « pourquoi » vos clients vous achèteront votre produit.
Les avantages de la démarche Lean Startup sont nombreux : il s’agit d’un travail d’équipe (donc collaboratif), vous vous adaptez en continu et de façon itérative, vous calquez à la réalité au lieu de vivre dans l’imaginaire et vous maximisez vos chances de succès tout en réduisant vos risques de plantage ! N’oubliez pas que 4 produits technologiques sur 5 ne trouvent jamais leur marché et que 75% des startups se plantent en moins de 2 ans.
4 – En guise de conclusion
Ce qu’il faut retenir de l’approche Lean Startup, c’est qu’elle vous permet de valider rapidement et à moindre coût, par étapes successives, que ce que vous voulez produire à plus grande échelle a de la valeur pour votre marché.
Si vous appliquez cette méthode, vous arriverez à cerner les véritables attentes de vos clients, vous réduirez les risques d’échec et vous augmenterez par conséquent vos chances de succès, vous « taperez dans le mille » sans gaspiller vos ressources. Un conseil : faites-le en équipe (même s’il est possible de l’utiliser seul), comme nous l’avons vu, le collectif est très souvent plus efficace.
Vous voyez donc que le Lean Startup est une démarche qui est adaptée à toutes les entreprises (pas que les startups), dans tous les domaines (tout le monde à des clients et une offre à leur proposer) et peut être utile à toute démarche de conception de produit ou de service.
Si vous souhaitez goûter pour de vrai aux bénéfices du Lean Startup, en comprendre toutes les « ficelles », acquérir des outils pragmatiques et efficaces, vous pouvez suivre la formation proposée les 7 et 8 avril par François de Réussir Son Entreprise. Il pourra ensuite vous aider à mettre en œuvre la démarche dans votre contexte.
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